Comment j’ai brisé dans l’œuf la brillante carrière politique en devenir d’Alexis IZARD – épisode 3

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C’est aujourd’hui, 11 décembre 2020, le dernier délai que s’est fixée la Commission des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) pour étudier les comptes des listes présentes au second tour des élections municipales dont les résultats ont été contestés. Or, si jamais la Commission n’avait pas eu le temps d’étudier les comptes, alors ceux-ci seraient considérés comme validés d’office. Mais ne rêvons pas trop !


Je rappellerais d’abord que toute décision de la Commission est alors soumise au juge de l’élection, qui peut très bien la confirmer, l’amoindrir, la durcir voire carrément l’annuler.

Ensuite, que les griefs que j’ai porté à l’encontre d’Alexis IZARD et d’Éric MEHLHORN ont également été portés devant le juge de l’élection dans mes mémoires en défense de juillet.

De telle sorte que le juge de l’élection devra de toute façon se prononcer à son tour par rapport aux décisions de la Commission qui doivent cependant orienter sa décision.

Enfin, que les décisions sont généralement notifiées sous 15 jours. Je pense ainsi recevoir la mienne vers le 20 décembre.

Je demanderai aussi, ainsi que j’y suis autorisé, l’issue des décisions concernant IZARD et MEHLHORN le 15 décembre. Nous verrons bien quand je les recevrais.


Dans ce troisième épisode, je voudrais vous expliquer le fameux “triple piège” dans lequel Alexis IZARD est tombé.

Mais pour bien tout comprendre, il faut avoir en tête le principe du financement électoral, trois articles du code électoral, et quelques notions de jurisprudences :

Une dépense de campagne est une dépense qui est réalisée en vue d’obtenir des suffrages.

Elle doit être inscrite (déclarée) au compte de campagne.

Par réciproque, des opérations électorales qui ont pu permettre au candidat d’obtenir des suffrages peuvent être requalifiées en dépenses électorales.

Ainsi, gare au candidat qui aurait omis de déclarer les dépenses de ses opérations électorales, car la Commission a la possibilité de les réintégrer au compte et en fonction de ce qu’elles représentent, soit de réformer le compte (le modifier généralement en diminuant la part du remboursement prévu pour le candidat) soit de l’invalider.

À relever que la Commission admet que de menues dépenses, par rapport au total des dépenses ou au plafond du maximum de dépenses autorisées, soient réglées par un tiers voire omises du compte si elles n’étaient pas directement destinées à l’obtention de suffrages (par exemple certains frais bancaires).


Venons-en à nos trois articles de code électoral :

  • l’article L.52-12 qui prévoit que le compte de campagne retrace (toutes) les dépenses engagées en vue de l’élection ;
  • l’article L.52-8 qui interdit les concours en nature (les dons) des personnes morales (les entreprises, les associations…) ;
  • l’article L.106 qui punit les dons, promesses et autres achats de voix. Étant précisé que n’est pas considéré comme de l’achat de voix la remise d’objets ou de cadeaux promotionnels, à faible coût unitaire, logotypés à l’image du candidat ou de sa campagne.

Alors, je ne vais pas parler ici des rumeurs qui ont circulé relativement à des promesses qui auraient pu être faites par la liste d’Alexis IZARD et qui ont permis à sa liste d’obtenir 43 % dès le premier tour aux Prés-saint-Martin.

Et l’avocat bordelais d’Alexis de vous dire : “oui mais vous ne pouvez pas prouver que mon client est à l’origine de ses promesses ou qu’il les ait faites lui-même.”

Non, nous allons parler des distributions de colis qui ont été réalisées entre les deux tours par Alexis IZARD et ses colistiers, à travers le seul témoignage de l’intéressé !


Pour analyser le caractère électoral de dépenses litigieuses, la Commission va procéder par la méthode dite du faisceau d’indices.

Elle va chercher à voir s’il y a une unité de lieu, de temps et d’action du candidat, l’origine et la destination de la dépense et notamment si la démarche a pu lui rapporter des voix.

Elle va par exemple regarder si Alexis IZARD a l’habitude de distribuer des colis, avec quoi dedans, stockés où, avec qui, financés par qui, donnés à qui, s’il en fait la publicité sur les réseaux sociaux de sa campagne et enfin si cela lui a rapporté des voix.

Et je pense qu’Alexis, dont nous allons nous interroger sur le financement des colis, est un petit peu dans la merde parce qu’il n’a fait cela que pendant l’entre-deux tours, avec des colis assemblés et stockés dans sa permanence, pour une valeur que j’estime entre 20 et 30 euros par colis, avec uniquement ses colistiers, plus une publicité sur ses réseaux sociaux de campagne en tant que liste, enfin que les gens qui avaient besoin de ces colis habitent sur les trois bureaux qui lui ont donné ses meilleurs scores (37 % à Grand-Vaux et 54 % aux Prés-saint-Martin contre 22,4 % sur la commune) avec la plus forte augmentation (+ 23 points sur Grand-Vaux et + 11 points aux PSM alors qu’il n’a gagné que 0,5 point sur la ville).


Ainsi :

  • Qu’Alexis prétende donc que ce n’étaient pas des opérations électorales et qu’il ne les ait donc pas inscrites à ce titre dans son compte, le fait est qu’elles lui ont rapporté des voix donc qu’il aurait alors enfreint l’article L.52-12 du code électoral (1er piège),
  • Qu’Alexis ait inscrit ces dépenses dans son compte en tant que concours en nature, son « partenariat avec les associations et commerçants », les quantités et l’uniformité des produits récoltés ne pourront que démontrer qu’il s’agit de dons de personnes morales (en l’occurrence de commerçants même si ce sont des produits déstockés donnés par la personne physique du commerçant) donc qu’il aurait alors enfreint l’article L.52-8 du code électoral (2e piège),
  • Qu’Alexis ait inscrit ces dépenses dans son compte, parce qu’il les ait payées régulièrement avec l’argent de sa campagne, ou qu’il arrive à convaincre la Commission qu’il s’agissait de concours en nature de personnes physiques, et de toute façon, il est cuit parce qu’il aura enfreint l’article L.106 du code électoral en tant que ces dons à 150 familles lui ont rapporté des voix, ainsi qu’il a précédemment été démontré (le public qui pouvait être intéressé par ces colis et les seuls bureaux sur lesquels il a très fortement progressé entre les deux tours alors que cela a été sa seule grosse action). (3e piège)

Donc peu importe la solution choisie par Alexis, il a commis une fraude qui devrait normalement provoquer l’invalidation de son compte, logiquement suivie, vu la gravité des faits, d’une peine d’inéligibilité.


IZARD est loin d’être con, d’autant plus qu’il n’a pas fait sa campagne seul (je parle de son parti  ; il a fait venir BLANQUER à Savigny, et de ses appuis politiques comme Vincent DELAHAYE). Il s’est renseigné sur la légalité d’une telle opération. On lui aurait dit d’effacer ces preuves des réseaux sociaux.

Pour autant qu’il puisse être méconnaissant du droit électoral, il y a tellement d’éléments qui posent question dans cette campagne et sur lesquels Alexis a été alerté, notamment au moyen de mes articles, qu’il ne pouvait pas ne pas savoir qu’il s’engageait sur une pente glissante.


Cela écrit, MEHLHORN aussi a déconné avec les distributions des masques. Fournis par la personne morale de la Région, le seul à avoir le droit d’en distribuer, le matin à la gare, avec ses seuls colistiers, une action dont il s’est vanté sur les mêmes réseaux sociaux avec lesquels ils faisaient campagne, et évidemment et heureusement non présentés comme des objets ou cadeaux promotionnels.

Mais dans son cas, et au vu de la jurisprudence, il pourrait s’en tirer avec simplement une amende de 2000 euros environ. D’autant que la valeur des masques ne représentaient pas l’équivalent du contenu des colis alimentaires.

En tout cas, les réseaux sociaux sont formidables pour traquer et démasquer les fraudeurs qui se vantent eux-mêmes de leurs fraudes. Voyons maintenant ce qu’en dira la Commission puis le Tribunal !



2 commentaires

  1. « Voyons maintenant ce qu’en dira la Commission puis le Tribunal ! » A mon humble avis, ils en diront pas grand chose, et ça n’ira pas beaucoup plus loin. Ce n’est juste que mon intuition mais c’est ce que pense aussi Alexis IZARD pour en avoir parlé avec lui. Wait and see, nous verrons bien …

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