J’entends beaucoup dire que si l’abbé Pierre avait pu se marier, alors il n’aurait pas fait ce qu’il a fait.
Bah probablement quand même que si…
Parce qu’à la lecture de ce qui sort, on n’est pas uniquement sur un mec en manque, mais vraiment plus sur un malade mental, obsédé sexuel et atteint de plusieurs paraphilies.
Je retiens deux éléments intéressants dans les critiques du comportement de l’abbé Pierre.
1°) La recherche inconsciente d’une Église irréprochable, ce qui trahit la haute attente morale de nos concitoyens vis-à-vis de l’Église.
2°) Le fait que les gens veulent des prêtres qui se marient, parce qu’ils veulent qu’il y ait encore et toujours des prêtres.
Déjà parce que c’est toujours plus swag d’avoir un religieux consacré pour les cérémonies familiales qu’un simple diacre ou pire un laïc.
Ensuite, parce que si jamais Dieu existe et qu’il y a un paradis, c’est quand même mieux qu’il y ait des prêtres pour le faire advenir, et prier à ma place pour que j’y aille.
De vous à moi, n’est-il pas paradoxal que des gens qui reprochent à l’Église de s’occuper de leur sexualité, se mêlent également de la sexualité de leur clergé ?
Avec mon groupe Galates Essonne, nous avons interrogé une douzaine de prêtres essonniens sur ce qui les rendait heureux ; et la question de la sexualité s’est naturellement posée.
Mais comme dans tout groupe humain, certains vivent très bien en restant célibataires, parce qu’ils n’ont pas ce besoin, certains le vivent très mal et compensent plus ou moins heureusement, tandis que d’autres sont en couple, mais vivent cachées ; et ils ne sont pas forcément plus malheureux dès lors qu’il n’y a pas d’enfants. Il y a encore ceux qui sont homosexuels, mais je vous renvoie plutôt à la lecture de Sodoma de Frédéric MARTEL.
En somme, l’interdiction du célibat (voulue tardivement dans l’Église pour empêcher des querelles d’héritage et de devoir payer pour la femme et les enfants), qui est elle-même à distinguer de la chasteté, qui n’est imposée qu’aux moines et pas aux prêtres, n’est sûrement pas la solution.
Mais l’obligation du mariage, réclamée par certains, n’est pas non plus une bonne chose ; en tout cas pas pour régler les troubles sexuels de certains.
Plus que la sexualité, le problème dans l’affaire de l’abbé Pierre est d’abord celui du cléricalisme.
Tout le monde savait, mais tout le monde a fermé sa gueule, parce qu’on ne va rien dire contre un prêtre charismatique qui rapporte du fric et donne une bonne image de l’institution.
La difficulté est aujourd’hui, que dans un monde où on efface tout ce qui dérange, on cancelle ou on ghoste l’œuvre sociale de l’abbé Pierre, en même temps que la personne.
Bref, l’Église a fait un calcul, qui était un mauvais calcul, et qu’elle va payer aujourd’hui.
Ce qu’il faut maintenant souhaiter est que cette affaire aide à ouvrir tous les débats précités dans l’Église institutionnelle, dont les changements ne sont jamais réellement venus de la base, mais toujours d’une impulsion à l’intérieur du clergé.
Peut-être enfin que si nous n’avions pas ou plus de clergé, et donc plus ces relations de pouvoir, alors il n’y aurait plus ces emprises possibles ?
Le concile Vatican II a essayé de remettre laïc et consacré sur un pied d’égalité, mais la deuxième catégorie ne l’a pas entendu ainsi.
Ce qui peut aisément se comprendre, au regard de l’engagement pris par ces derniers.
Sauf que ce n’est pas cela le christianisme originel de Jésus, dans lequel les chefs de prières n’étaient pas des abbés.
Malheureusement, on couvre tout autant les dérives de ses amis ou de ses idéologies, sans besoin d’une quelconque rétorsion…

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