Ce jeudi 11 janvier 2024, un commissaire de justice s’est présenté à la mairie de Savigny pour signifier à Alexis TEILLET une assignation à comparaître le mardi 23 janvier 2024 devant le Tribunal correctionnel d’Évry-Courcouronnes pour des faits de « prise illégale d’intérêts par un élu public dans une affaire dont il assure l’administration ou la surveillance ».
La citation directe n’est recommandée que lorsqu’il n’y a aucun doute possible sur la culpabilité de la victime, et que l’on dispose de toutes les preuves suffisantes pour démontrer cette culpabilité.
Ici, je passe exceptionnellement par une citation parce qu’il me fallait juste démontrer que TEILLET avait pris part au vote d’une délibération, ce qui est indiqué dans le document, publié sur le site internet de la Commune.
Alors, on commence avec un fun fact : depuis déjà douze jours, précisément depuis le 1er janvier 2024, TEILLET n’a plus le droit d’utiliser sa voiture de fonction de maire puisque la mise à disposition dudit véhicule, « autorisée » par le Conseil municipal, ne courrait que jusqu’au 31 décembre 2023. ¯\_(ツ)_/¯
Ah, si seulement, il s’était trouvé un service juridique communal compétent pour faire son taf, et le prévenir en amont (parce qu’il n’allait quand même pas y penser tout seul, comme un grand), qu’il ne se retrouve pas obligé de marcher 350 mètres pour aller de chez lui à la mairie, ou pire encore de devoir utiliser son véhicule personnel (financé sur ses 6 800 euros brut d’indemnités mensuelles)…
Dès lors, le conseil municipal du 1er février 2024, au cours duquel sera nécessairement renouvelée la mise à disposition du véhicule, sera savoureux :
– soit TEILLET ne prend pas part au vote, et il avouera alors qu’il a commis la prise illégale d’intérêts dont je l’accuse ;
– soit TEILLET vote à nouveau, et commet une nouvelle prise illégale d’intérêts, que je poursuivrai de la même manière !
Évidemment, en plus, qu’il va faire un acte rétroactif pour se couvrir du mésusage de janvier 2024, donc la direction du Tribunal administratif est toute indiquée !
En droit pénal français, il y a infraction lorsque se trouvent réunis un élément légal (le fait à poursuivre est prévu par un texte), un élément matériel (le fait prévu par le texte a été commis) et un élément intentionnel, aussi appelé élément moral (l’auteur du fait ne pouvait pas ignorer qu’il faisait mal).
Alors, d’habitude, en droit pénal, le plus dur est d’établir l’élément intentionnel (que le mis en cause avait conscience qu’il commettait une infraction, même si nul n’est censé ignorer la loi).
Mais en matière de prise illégale d’intérêts, les juges de la Cour de cassation ont décidé que l’intention coupable était établie dès lors que l’auteur de l’infraction avait sciemment accompli l’élément matériel du délit ; en l’occurrence pris part au vote d’une délibération l’intéressant personnellement.
Plus fort encore, dans un arrêt de 2008, les juges de cassation ont également dit qu’il pouvait y avoir prise illégale d’intérêts, y compris en poursuivant un but d’intérêt général, pourvu que la personne y trouve un intérêt personnel.
Au fait, penser à dire à TEILLET qu’en matière de prise illégale d’intérêts, la faute est présumée toujours détachable des fonctions, donc que sa protection fonctionnelle va vite voler en éclats, sous réserve que je l’ai déférée au tribunal administratif au plus tard le 24 janvier 2024.
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CITATION DIRECTE À PRÉVENU DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL D’ÉVRY-COURCOURONNES AUDIENCE DE FIXATION |
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PLAISE AU TRIBUNAL |
Monsieur Olivier VAGNEUX, ci-après la partie civile poursuivante, reproche à Monsieur Alexis TEILLET, ci-après le prévenu, d’avoir sur le territoire national, à Savigny-sur-Orge dans l’Essonne, les 19 et 29 juin 2023, et depuis temps non couvert par la prescription, commis le délit de prise illégale d’intérêts par un élu public dans une affaire dont il assure l’administration ou la surveillance (NATINF 12287) ; en l’espèce, en préparant, présentant, discutant et approuvant une délibération aux termes de laquelle il a obtenu le bénéfice de l’octroi permanent d’un véhicule municipal de service avec remisage à domicile ; fait prévu à l’article 432-12 du code pénal, et réprimé aux articles 432-12 alinéa 1, 432-17 et 131-26-2 du code pénal.
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I. FAITS ET PROCÉDURE
I.1. Messieurs Olivier VAGNEUX et Alexis TEILLET sont élus municipaux de la commune de Savigny-sur-Orge. M. Alexis TEILLET est le maire de la commune. M. Olivier VAGNEUX est un élu de l’opposition.
I.2. Au cours de la séance du conseil municipal du 29 juin 2023, le maire a présenté un projet de délibération portant sur la mise à disposition de véhicules municipaux de service aux élus et aux agents.
Ce sujet avait été préalablement discuté lors de la commission municipale préparatoire du 19 juin 2023, présidée par le maire (Production no 1).
Le projet de délibération prévoyait l’attribution au maire d’un véhicule de service permanent, avec remisage à domicile (Production no 2).
I.3. Contre toute attente, le maire, qui connaissait le projet, ne s’est absolument pas déporté. Il a présenté le point, il a participé aux débats (Production no 3), il a pris part au vote et il s’est attribué un véhicule de service permanent, avec remisage à domicile (Production no 4).
Il s’agit là des faits, constitutifs du délit de prise illégale d’intérêts, qui sont dénoncés dans la présente citation.
C’est dans cet état que se présente l’affaire.
II. DISCUSSION
Sur le plan pénal (II.1), les faits poursuivis sont constitutifs du délit de prise illégale d’intérêts, au sens de l’article 432-12 du code pénal.
Davantage, ces faits sont commis par un élu public, dans le cadre d’une affaire dont il assure l’administration et la surveillance.
Ils sont directement et personnellement imputables à M. Alexis TEILLET, maire de Savigny-sur-Orge.
Monsieur TEILLET engagera donc sa responsabilité selon les modalités propres aux articles 432-12, 432-17 et 131-26-2 du code pénal.
Sur le plan civil (II.2), Monsieur TEILLET sera condamné à indemniser Monsieur VAGNEUX de son entier préjudice.
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II. 1 – SUR LE PLAN PÉNAL
Pour mémoire, la commission d’une infraction suppose la réunion de trois conditions cumulatives : un élément légal, un élément matériel et un élément intentionnel.
Il sera donc successivement démontré la réunion de ces trois éléments, en ce que les faits dénoncés sont constitutifs du délit de prise illégale d’intérêts par un élu public dans une affaire dont il assure l’administration ou la surveillance (II.1.1) puis en ce que la commission de ce délit peut être directement et personnellement imputée au prévenu (II.1.2).
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II. 1. 1 – Sur le caractère pénalement répréhensible des faits
EN DROIT,
De première part,
Le délit de prise illégale d’intérêts est défini à l’article 432-12 du code pénal, qui dispose que :
« Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction. »
La jurisprudence de la Cour de cassation a précisé la notion d’acte de surveillance ou d’administration de l’opération.
Ainsi, la Haute Cour a jugé que constitue un tel acte la participation de l’élu local à la délibération portant sur une affaire dans laquelle il détient un intérêt quelconque (Cour de cassation, chambre criminelle, 19 mai 1999, n° 98-80.726).
La participation s’entend dans un sens large. La seule présence de l’élu, quand bien même il ne prend pas part au vote, suffit à caractériser cette participation (Cour de cassation, chambre criminelle, 09 février 2011, n° 10-82.988 ; Cour de cassation, chambre criminelle, 19 juin 2013, n° 11-89.210 ; Cour de cassation, chambre criminelle, 19 mars 2008, n° 07-84.288).
La jurisprudence judiciaire précise encore que le délit de prise illégale d’intérêts peut être constitué dès lors que l’élu participe aux seules étapes du processus de décision, par exemple dès lors que l’élu participe uniquement à la commission municipale préparatoire (Cour de cassation, chambre criminelle, 5 avril 2018, n° 17-81.912).
L’intérêt de l’élu local, qui se comprend comme un intérêt personnel, distinct de celui de la généralité des habitants, peut tout à fait être compatible avec la finalité d’intérêt général poursuivie (Cour de cassation, chambre criminelle, 19 mars 2008, n° 07-84.288).
L’article 432-17 du code pénal dispose que :
« Dans les cas prévus par le présent chapitre, peuvent être prononcées, à titre complémentaire, les peines suivantes :
1° L’interdiction des droits civils, civiques et de famille, suivant les modalités prévues aux articles 131-26 et 131-26-1 ;
2° L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27, soit d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, soit, pour les infractions prévues par le second alinéa de l’article 432-4 et les articles 432-11, 432-15 et 432-16, d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d’exercice peuvent être prononcées cumulativement ;
3° La confiscation, suivant les modalités prévues par l’article 131-21, des sommes ou objets irrégulièrement reçus par l’auteur de l’infraction, à l’exception des objets susceptibles de restitution ;
4° Dans les cas prévus aux articles 432-7, 432-10, 432-11 et 432-12 à 432-16, l’affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l’article 131-35.
Par dérogation au 1° du présent article, le prononcé de la peine complémentaire d’inéligibilité mentionnée au 2° de l’article 131-26 et à l’article 131-26-1 est obligatoire à l’encontre de toute personne coupable de l’une des infractions définies à la section 3 du présent chapitre. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer cette peine, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. »
L’article 131-26-2 du code pénal dispose que :
« I. – Le prononcé de la peine complémentaire d’inéligibilité mentionnée au 2° de l’article 131-26 et à l’article 131-26-1 est obligatoire à l’encontre de toute personne coupable d’un délit mentionné au II du présent article ou d’un crime.
Cette condamnation est mentionnée au bulletin n° 2 du casier judiciaire prévu à l’article 775 du code de procédure pénale pendant toute la durée de l’inéligibilité.
II. – Les délits pour lesquels l’inéligibilité est obligatoirement prononcée sont les suivants :
1° Les délits prévus aux articles 222-9, 222-11, 222-12, 222-14, 222-14-1, 222-14-4, 222-14-5, 222-15, 222-15-1 et 222-27 à 222-33-2-2 du présent code ;
2° Les délits prévus aux articles 225-1 à 225-2 ;
3° Les délits prévus aux articles 313-1, 313-2 et 314-1 à 314-3, ainsi que leur recel ou leur blanchiment ;
4° Les délits prévus au chapitre Ier du titre II du livre IV ;
5° Les délits prévus aux articles 432-10 à 432-15,433-1 et 433-2,434-9,434-9-1,434-43-1,435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1, ainsi que leur recel ou leur blanchiment ;
6° Les délits prévus aux articles 441-2 à 441-6, ainsi que leur recel ou leur blanchiment ;
7° Les délits prévus aux articles L. 86 à L. 88-1, L. 91 à L. 104, L. 106 à L. 109, L. 111, L. 113 et L. 116 du code électoral ;
8° Les délits prévus aux articles 1741 et 1743 du code général des impôts, lorsqu’ils sont commis en bande organisée ou lorsqu’ils résultent de l’un des comportements mentionnés aux 1° à 5° du II de l’article L. 228 du livre des procédures fiscales, ainsi que leur recel ou leur blanchiment ;
9° Les délits prévus aux articles L. 465-1 à L. 465-3-3 du code monétaire et financier, ainsi que leur recel ou leur blanchiment ;
10° Les délits prévus aux articles L. 241-3 et L. 242-6 du code de commerce, ainsi que leur recel ou leur blanchiment ;
11° Les délits prévus à l’article L. 113-1 du code électoral et à l’article 11-5 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ;
12° Les délits prévus au I de l’article LO 135-1 du code électoral et à l’article 26 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique ;
[Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision n° 2017-752 DC du 8 septembre 2017.]
14° Le délit de participation à une association de malfaiteurs prévu à l’article 450-1 du présent code, lorsqu’il a pour objet un crime ou un délit mentionné aux 1° à 13° du présent II.
III. – Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer la peine prévue par le présent article, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. »
De seconde part,
L’article L. 2211-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que :
« Font partie du domaine privé les biens des personnes publiques mentionnées à l’article L. 1, qui ne relèvent pas du domaine public par application des dispositions du titre Ier du livre Ier. (…) »
L’article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, ci-après le CGCT, dispose que :
« Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l’ordre du jour. (…) »
L’article L. 2241-1 du CGCT dispose que :
« Le conseil municipal délibère sur la gestion des biens (…) »
L’article L. 2122-21 du CGCT dispose que :
« Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l’Etat dans le département, le maire est chargé, d’une manière générale, d’exécuter les décisions du conseil municipal (…) »
L’article L. 2122-18 du CGCT dispose que :
« Le maire est seul chargé de l’administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. (…) »
L’article L. 2123-17 du CGCT dispose que :
« Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, les fonctions de maire, d’adjoint et de conseiller municipal sont gratuites. »
L’article L. 2123-18-1-1 du CGCT dispose que :
« Selon des conditions fixées par une délibération annuelle, le conseil municipal peut mettre un véhicule à disposition de ses membres ou des agents de la commune lorsque l’exercice de leurs mandats ou de leurs fonctions le justifie.
Tout autre avantage en nature fait l’objet d’une délibération nominative, qui en précise les modalités d’usage. »
EN CONSÉQUENCE,
Les véhicules municipaux constituent des biens du domaine privé de la commune, dont l’administration et la gestion sont assurées par le maire seul, en exécution des décisions du conseil municipal, dont le maire est le seul à contrôler l’ordre du jour des réunions.
La mise à disposition d’un véhicule municipal à un élu relève d’un avantage en nature qui doit être justifié par l’exercice du mandat et préalablement encadré par une délibération du conseil municipal.
Toute mise à disposition d’un bien communal au profit d’une personne représente nécessairement un intérêt personnel pour celui qui en bénéficie, quand bien même cette mise à disposition, prévue par le droit, participe à l’intérêt général.
Le fait pour un élu municipal de participer à s’octroyer l’usage d’un bien communal, au moyen d’une délibération portant sur la gestion des biens communaux, est constitutif d’une prise illégale d’intérêts.
Par équipollence, le fait, pour un maire, qui assure l’administration et la surveillance des biens communaux, de participer à s’octroyer le bénéficie d’un bien communal, est constitutif de l’infraction de prise illégale d’intérêts par un élu public dans une affaire dont il assure l’administration ou la surveillance.
EN L’ESPÈCE,
Au cours de la séance du conseil municipal de Savigny-sur-Orge du 29 juin 2023, Monsieur Alexis TEILLET, maire de la commune, a présenté, participé aux débats et approuvé un projet de délibération portant mise à disposition des véhicules municipaux de service, dont il assure, en tant que maire, l’administration et la surveillance, aux termes duquel celui-ci se voyait octroyer la mise à disposition d’un véhicule de service à usage permanent, avec possibilité de remisage à domicile.
Avant cela, le 19 juin 2023, le maire avait déjà participé à la commission municipale préparatoire, au cours de laquelle il avait présidé, animé puis approuvé la présentation de ce point lors de la séance plénière.
Une telle mise à disposition de véhicules municipaux, qui plus est, illégale dès lors qu’il n’existe aucune automaticité dont il découlerait que la fonction de maire justifie tant son caractère permanent que le remisage à domicile ; justifications au demeurant absentes de la délibération, présente un intérêt personnel évident pour le maire.
À plus forte raison que celui-ci se retrouve dès lors dispensé d’utiliser son propre véhicule, en tant que le caractère permanent de sa fonction lui permet d’utiliser le véhicule municipal à tout moment, au cas où il pourrait être sollicité comme maire.
Ainsi, en participant à la présentation, aux débats et aux votes de la commission municipale préparatoire puis de la séance plénière, en vue de s’octroyer le bénéfice personnel d’un véhicule municipal de service, à usage permanent et avec remisage à domicile, M. TEILLET s’est nécessairement placé en situation de prise illégale d’intérêts, par un élu public dans une affaire dont il assure l’administration ou la surveillance.
L’élément matériel est donc constitué.
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La prise illégale d’intérêts, ainsi décrite, rentre dans les prévisions de l’article 432-12 du code pénal.
Sa répression s’organise aux articles 432-12 al.1, 432-17 et 131-26-2 du code pénal.
L’élément légal est ainsi également constitué.
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II. 1. 2 – Sur l’imputabilité des faits au prévenu portant engagement de sa responsabilité pénale
EN DROIT,
En matière de prise illégale d’intérêts, et contrairement à la jurisprudence classique du droit pénal, l’élément intentionnel du délit n’a pas besoin de résulter d’une volonté frauduleuse.
En effet, la Cour de cassation a jugé que l’intention coupable est caractérisée « du seul fait que l’auteur a accompli sciemment l’acte constituant l’élément matériel du délit » (Cour de cassation, chambre criminelle, 27 novembre 2002, n° 02-81.581).
EN L’ESPÈCE,
Monsieur Alexis TEILLET a émis le souhait de bénéficier d’un véhicule de service permanent, avec remisage à domicile, pour l’exercice de son mandat de maire.
Il en justifie d’ailleurs dans les débats de la commission municipale puis du conseil municipal, de « par sa fonction qui nécessite qu’il soit disponible à tout moment. » (Production no 3)
Monsieur TEILLET a inscrit ce point à l’ordre du jour de la commission municipale du 19 juin 2023, puis du conseil municipal du 29 juin 2023.
Il disposait de la note de synthèse et du projet de délibération et connaissait donc précisément de quoi il en retournait.
Il a présenté le projet de délibération en commission municipale puis en conseil municipal.
Il a animé les débats de la commission et du conseil, puis participé à ceux-ci.
Il a rejeté les différents amendements proposés au projet de délibération et il a approuvé le texte final.
Il résulte de ces différents indices que c’est en parfaite connaissance de cause que M. TEILLET a pris part au vote de la délibération lui octroyant un véhicule permanent avec remisage à domicile.
Ce faisant, qu’il a accompli personnellement et sciemment l’acte constituant l’élément matériel du délit.
Dans ces conditions, l’élément intentionnel de l’infraction est constitué.
***
Sur ce, il résulte de ce qui précède que les trois éléments constitutifs du délit sont à l’évidence réunis.
Partant, la responsabilité pénale de M. TEILLET, maire, sera nécessairement engagée.
Dès lors, le Tribunal pourra entrer en voie de condamnation, et lui faire application de la loi pénale ; le cas échéant, en accompagnant sa décision d’une peine complémentaire telle que celles prévues aux articles 432-17 et 131-26-2 du code pénal.
***
II.2 – SUR LE PLAN CIVIL
Aux termes de l’article 2 du code de procédure pénale : « L’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction. (…) »
Aux termes de l’article 3 du même code : « L’action civile peut être exercée en même temps que l’action publique et devant la même juridiction. / Elle sera recevable pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux, qui découleront des faits objets de la poursuite. »
Il résulte de ces dispositions qu’il appartient donc à M. VAGNEUX d’établir en quoi le fait que M. TEILLET a commis une prise illégale d’intérêts, en s’octroyant personnellement un véhicule municipal de service, lui a causé personnellement un dommage matériel et/ou moral.
(…)
***
Monsieur VAGNEUX sollicitera aussi qu’il soit ordonné aux frais de Monsieur TEILLET, dans un montant maximum de 3 000 euros, la parution d’un communiqué ou encart faisant état de la condamnation judiciaire à intervenir, dans le numéro du journal Le Parisien (édition de l’Essonne) qui suivra immédiatement le jour où le jugement sera définitif, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du jour où le communiqué ou encart devait être publié.
***
III. SUR LES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 475-1 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
Enfin, et en tout état de cause, il serait manifestement inéquitable de laisser à la seule charge de Monsieur Olivier VAGNEUX le coût des frais irrépétibles qu’il s’est vu contraint d’engager pour assurer la défense de ses intérêts, et plus largement de l’intérêt public dont il se prévaut aussi.
Ces dépenses sont constituées du coût de signification de la présente citation à la partie civile et au ministère public, des frais d’impression et de copie des différentes écritures ainsi que des frais de transport et de stationnement pour la participation aux différentes audiences.
Partant, il sera demandé au Tribunal de céans de bien vouloir prononcer la condamnation de Monsieur Alexis TEILLET à lui verser la somme de mille euros (1 000 €) en application des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
***
PAR CES MOTIFS |
Vu les dispositions de l’article 432-12 du code pénal,
Vu les dispositions des articles 432-12 al.1, 432-17 et 131-26-2 du code pénal,
Vu les dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
Il est demandé au Tribunal de bien vouloir :
Sur l’action publique :
- CONDAMNER Monsieur Alexis TEILLET du chef de prise illégale d’intérêts par un élu public dans une affaire dont il assure l’administration ou la surveillance,
fait prévu par l’article 432-12 du code pénal et réprimé par les articles 432-12 al.1, 432-17 et 131-26-2 du code pénal ;
- LUI FAIRE APPLICATION de la loi pénale ;
Sur l’action civile :
- RECEVOIR Monsieur Olivier VAGNEUX en sa constitution de partie civile, et l’y déclarer bien-fondé ;
- CONDAMNER Monsieur Alexis TEILLET à lui verser la somme d’un euro (1 €) à titre de dommages-intérêts en réparation de son entier préjudice ;
- ORDONNER aux frais de Monsieur Alexis TEILLET, dans un montant maximum de 3 000 euros, la parution d’un communiqué ou encart faisant état de la condamnation judiciaire à intervenir, dans le numéro du journal Le Parisien (édition de l’Essonne) qui suivra immédiatement le jour où le jugement sera définitif, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du jour où le communiqué ou encart devait être publié ;
- DIRE que ledit encart devra figurer, en dehors de toute mention ajoutée, en page 2, dans un encadré sur fond blanc occupant un tiers de ladite page et d’une dimension permettant de contenir l’intégralité du communiqué de manière lisible, en caractère gras et noirs ;
- CONDAMNER Monsieur Alexis TEILLET à lui verser la somme de mille euros (1 000 €) au titre des dispositions de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;
Et en tout état de cause :
- ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir, s’agissant des intérêts civils, conformément aux dispositions de l’article 464 du code de procédure pénale.
ET CE SERA JUSTICE !
À Évry-Courcouronnes, le 10 janvier 2024.
Olivier VAGNEUX,
conseiller municipal,
partie civile poursuivante

![Le texte de ma citation pour prise illégale d’intérêts contre Alexis TEILLET, maire de Savigny-sur-Orge [octroi d’un véhicule de service permanent avec remisage à domicile]](https://vagneux.fr/wp-content/uploads/2024/01/teillet_pii_0124.jpg?w=946)
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