Pour commencer, il convient de définir ce qu’est la social-démocratie en France.
Et c’est la définition, donnée par Lionel JOSPIN, qui me semble être la plus convaincante : des valeurs démocratiques et sociales appliquées à la régulation de la société de manière à mettre l’économie au service des Hommes.
Cette définition peut nous sembler idiote ; d’autant plus qu’elle correspond déjà à l’idée de la politique telle que pratiquée depuis longtemps au centre-droit, dans les mouvements issus de la démocratie-chrétienne.
Il est d’ailleurs intéressant de constater que la gauche a pu librement s’en emparer parce que ce fameux centre, s’était alors fait phagocyter par la droite. Mais surtout et en fait, nous y reviendrons, parce que le créneau n’était plus porteur !
Or, cette acceptation par la gauche de l’économie de marché, tout en refusant la société de marché. marque pourtant une vraie rupture dans le discours politique de la gauche.
Il faut bien se rappeler des propos de MITTERRAND avant 1983, et notamment sa fameuse sortie lors du discours fondateur du PS à Épinay en 1971 :
« Celui qui n’accepte pas la rupture (…) Celui qui ne consent pas à la rupture, avec l’ordre établi, avec la société capitaliste. Celui-là, je le dis, il ne peut pas être adhérent du Parti socialiste.«
Ce revirement traduit enfin la nécessité de réinvention de la gauche après la Guerre froide et l’échec du communisme, ce qu’elle n’arrivera jamais vraiment à faire.
En réalité, la gauche française n’a jamais vraiment eu l’occasion d’appliquer son tournant social-démocrate, qui s’est produit à la fin des années 1990.
Certes, celle-ci est au pouvoir jusqu’en 2002, mais les rares mesures sociales issues de la gauche plurielle que sont l’instauration de la CMU et le passage aux 35 heures, ne relèvent pas particulièrement d’une politique dite sociale-démocrate.
Et déjà à cette époque, la social-démocratie est déjà en train de filer vers la social-écologie, avec un partenaire écologiste qui devient moteur dans cette alliance. Tandis que dans le même temps, les sociaux-réformistes se tournent vers le social-libéralisme.
Et au milieu de cela, on a un homme, François HOLLANDE, qui est censé être le roi de la synthèse, et arriver à tout prendre pour former un tout cohérent.
Or, la gauche ne reviendra pas aux affaires avant 2012, avec HOLLANDE à la place de Dominique STRAUSS-KAHN !
Et même si elle disposera alors de tous les leviers de pouvoirs, Sénat compris, elle ne sera pas soutenue comme alternative à la politique de droite, parce que la France est à droite, et seul Manuel VALLS semble alors assez clairvoyant à ce moment, de voir que la France a voulu dégager la droite pour sortir Nicolas SARKOZY en se rabattant sur la deuxième force politique en présence, et pas par adhésion à la gauche.
Et c’est là que HOLLANDE, au lieu de jouer sur une ligne social-démocrate, voire social-écologiste, va aller concurrencer MÉLENCHON sur son terrain, en se faisant plus socialiste que les socialistes originaux : voir sa déclaration que son ennemi, c’est la Finance, et ses promesses aux ouvriers de Florange à qui il refusera la nationalisation temporaire.
Puis qui va complètement perdre pied au moment des municipales de 2014 où il va mettre le braquet tout à droite !
C’est la fin du keynésianisme et la mise en place d’une politique de économique de l’offre avec le CICE et le pacte de responsabilité.
C’est la déchéance de nationalité après les attentats.
C’est la loi EL-KHOMRI qui donne une définition du licenciement économique qui n’est pas de gauche, et qui se foire dans sa barémisation du plafonnement des indemnités prud’hommales. Et tout cela n’est corrigé que trop tard !
Au final, HOLLANDE n’a pas mené de politique social-démocrate. Il a d’abord mené une politique socialiste au sens historique du terme jusqu’en 2014, puis une politique réformiste et libérale à partir de 2014, laquelle est similaire à celle de la droite.
Or, HOLLANDE n’aurait pas pu mener une politique social-démocrate, parce que l’époque ne s’y prête plus, et que la sociologie électorale a changé, avec une gauche communiste orpheline, et un centre-gauche qui est effectivement à droite !
La financiarisation de l’économie en est arrivé à un tel stade qu’une politique mièvre est inaudible entre l’anti-libéralisme et l’ultra-libéralisme.
Or, le centre-droit qui n’existe plus, a déjà fait le choix, à la fin des années 1990 et au début des années 2000 d’assumer son libéralisme, non sans dire que c’est dans le système qu’ils pourront l’influencer, ce qui n’est pas faux mais qui n’est pas vrai.
En somme, le PS paie son héritage historique qui le situe dans un créneau bouché. Simplement, qu’il n’a jamais pu s’en rendre compte jusque-là, en tant que historiquement deuxième force politique face à la droite. Et il fallait que le PS retourne au pouvoir pour démontrer son imposture politique… Et peut-être pour choisir un camp, que le parti refuse encore…

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